Composition : 1914-1916
Création privée le 1er février 1916 par le Musikforeningen placé sous la direction du compositeur, puis création publique le 14 avril 1916
- Allegro
- Poco allegretto
- Poco adagio quasi andante
- Allegro
« Inextinguible » : du latin inexstinguibilis, conçu à partir du préfixe négatif in- ainsi que d’exstinguibilis, « que l’on peut anéantir », dérivé d’exstinguere : « éteindre, faire disparaître. » L’inextinguible, c’est en quelque sorte l’éternel. Et la vie est inextinguible dans la mesure où son souffle perdure au-delà de la naissance et de la mort de chaque individu. Lorsque Carl Nielsen compose sa Quatrième symphonie, le monde est en guerre. Nouvellement nommé professeur de théorie musicale et de composition à l’Académie de Copenhague, le compositeur assiste au désastre depuis son Danemark demeuré neutre dans ce conflit mondial. Il regrette que le sentiment national, « qui jusqu’ici était considéré comme quelque chose d’altier et de beau, [se soit] transformé en une syphilis spirituelle qui a dévoré les cerveaux, grimaçant par les orbites vide du crâne la haine de l’idiot. » Dans ses lettres, il explique : « Le sous-titre l’Inextinguible est un mot unique qui s’efforce de faire allusion à ce que la musique seule a le pouvoir d’exprimer pleinement : la volonté élémentaire de vivre. » Et de même : « J’ai l’idée d’une nouvelle composition, qui n’a pas de programme, mais qui doit exprimer ce que nous savons comme encouragement pour la vie et les manifestations de la vie et qui est : ʺTout ce qui bouge, qui peut être qualifié de ni mauvais ni bon, nu haut ni bas, ni grand ni petit, mais seulement ʹce qui est vieʹ ou ʹce qui a la volonté de vivreʹ. Tu sais : simplement vie et mouvement, cependant différent, très différent, dans un rapport flottant continuellement au sein d’un grand mouvement, dans un courant. J’ai besoin d’un mot ou d’un titre court pour dire cela ; c’est assez. Je ne puis tout à fait exprimer ce dont j’ai l’intention, mais cela est bon.ʺ » Il a alors l’idée d’un « duel entre deux timbales, quelque chose à propos de la guerre. » Puis le projet se précise : « La musique est Vie : dès qu’une note isolée résonne dans l’air ou l’espace, c’est le résultat de la Vie et du mouvement. C’est pourquoi la musique est l’expression la plus sensible de la pulsion de Vie. Cette symphonie décrit les sources les plus primitives du flux vital et le bonheur de sa perception, c’est-à-dire, ce qui touche l’être humain, le monde animal et végétal comme il peut être perçu ou vécu. Cette musique n’est pas basée sur un programme décrivant son évolution dans un espace et un temps limité, mais un aperçu des couches émotionnelles vitales qui restent semi-chaotiques et primitives… La musique est la vie, comme elle, inextinguible. »
Dans la quatrième symphonie, on retrouve Dès les premières mesures, la vie s’impose sous le thème irrépressible des cordes. Mais à cette vitalité se mêle aussi l’expression d’un effroyable chaos. De fait, le premier thème est d’une telle violence que c’est le motif suivant, à la douceur quasi pastorale, qui semble porter les espoirs du compositeur. Il en résulte, plus que la vie, une rage de vivre, aussi évidente dans les mouvements rapides que dans le mouvement lent, dont un thème est comparé par le compositeur à « un aigle chevauchant le vent ». Enchaînées, les quatre parties paraissent interdire tout repos. La lutte est incessante, jusqu’au finale où deux paires de timbales, disposées aux deux extrémités de l’orchestre, réalisent l’idée première du compositeur en s’affrontant à coup de triton diabolique, et que la symphonie accède à un Glorioso dont on ne sait s’il est vraiment optimiste.
François-Gildas TUAL
Nomenclature orchestrale :
3 flûtes (la 3ème jouant aussi le piccolo), 3 hautbois, 3 clarinettes, 3 bassons (le 3ème jouant aussi le contrebasson), 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba, timbales et cordes.
Durée approximative : 36 minutes
Première exécution à Monte-Carlo