– Gigues : I – Par les rues et par les chemins
– Iberia : II – Les parfums de la nuit
– Rondes de Printemps : III – Le matin d’un jour de fête
Œuvres franchement impressionnistes, les trois « Images pour orchestre », écrites par Debussy entre 1905 et 1912 sont les dernières œuvres purement orchestrales avant les compositions destinées au ballet.
Réunion fortuite de trois pièces absolument autonomes et possédant chacune une identité propre, leur originalité réside essentiellement dans le traitement pictural du matériau sonore au travers d’une nomenclature orchestrale très recherchée.
Gigues.
Engendrés par un son unique et intemporel qu’élargiront bientôt flûtes, célesta et harpe, deux thèmes vont se succéder au hautbois d’amour. Alors que le premier thème est tendrement nostalgique, le second thème revêt un caractère folklorique qui génèrera avec renfort de pizzicati de cordes une véritable ossature rythmique.
Constant paradoxe entre la gaîté attendue de la danse gigue et la résultante sonore qu’en fait Debussy : une sorte de portrait voilé ; celle d’un vieux clown ironiquement triste car résigné… Toute la richesse picturale réside dans l’amalgame subtile des teintes instrumentales que vont revêtir les deux thèmes tout au long de la pièce.
Iberia.
Composition tripartite, Iberia est sans nul doute la plus populaire des trois « Images » de Debussy. Evocatrice en ses deux parties extrêmes de la plus authentique sensibilité ibérique : verve, vigueur danse pleine d’élan et de fougue ; une animation désordonnée, riche en couleurs qui frôle parfois une certaine brusquerie. Toutefois, Debussy nous offre une vision bien personnelle du monde espagnol ; vision qui évite les clichés au profit d’une approche raffinée et originale se profilant dans des contours d’allure orientale.
Bien que d’allure parfois martiale (1er et 3ème volet), les effets stridents ponctuels n’empêchent pas un chatoiement sonore d’ensemble. Peut-on imaginer plus surprenante transition que celui engendré par l’épisode intermédiaire : « Les parfums de la nuit », où l’agitation première s’efface totalement au profit d’un apaisement irréel, paradisiaque, presque inespéré… Nous sommes en plein rêve, dans le domaine de l’immatériel…chaque sonorité se dégage des autres, se détache et semble se libérer des contraintes temporelles pour accéder à une contingence musicale nourrie de suavité. Ce magique sommeil s’achemine lentement vers un éveil que préparent les cloches pianissimo ; une discrète batterie réintroduit subrepticement la fougue initiale quasi sanguine : danse effrénée inhérente à l’Espagne.
Rondes de printemps.
Paradoxe encore dans cette pièce enjouée d’apparence facile, qui se déroule comme une ample valse opposant pourtant à la simplicité mélodique, une grande complexité rythmique. Le thème majeur d’essence populaire (ébauche, puis citation intégrale de la chanson française : « nous n’irons plus au bois »), donne lieu à un incroyable foisonnement de timbres, de couleurs ou l’inattendu surgit sans gratuité ; effets de surprise obéissant à une structure globale particulièrement recherchée. « Rondes » se déploie comme une vaste variation qui tournoie à partir d’une mélodie populaire qui s’accélérera puis se précipitera fortissimo sur le coup de timbales conclusif.
Alice BLOT
Nomenclature orchestrale :
2 flûtes, 2 piccolos, 2 hautbois, hautbois d’amour, cor anglais, 3 clarinettes, clarinette basse, 3 bassons, contrebasson, 4 cors, 4 trompettes, 3 trombones, timbales, percussion, 2 harpes, célesta et cordes.
Durée approximative : 7 minutes