– Allegro
– Adagio un poco mosso
– Rondo : Allegro ma non troppo
Dans le Cinquième concerto pour piano, on peut, tout comme dans la Symphonie « Héroïque » – deux œuvres dans la même tonalité de mi bémol – découvrir deux sources d’inspiration fort éloignées l’une de l’autre à première vue, et qui pourtant, chez Beethoven, se complètent et se corroborent.
D’une part, c’est l’écho de l’enthousiasme pour Bonaparte ; certes, le musicien n’a plus ses illusions de naguère, mais à l’heure où il écrit son Concerto (1810), l’épopée napoléonienne se poursuit, et, dans le premier mouvement surtout, c’est peut-être un peu cette marche d’apothéose qu’il glorifie malgré lui.
Mais c’est surtout le souvenir d’un bel amour, du fol espoir pour Thérèse de Brunswick, qui anime cette œuvre ; le musicien sait bien maintenant que tout est fini et pour la troisième fois au moins, il comprend qu’il ne peut se retrouver que dans son art : « Tu ne peux plus exister pour toi, écrit-il, mais seulement pour les autres : pour toi, il n’y a plus de bonheur que dans ton art… ». De ces deux déceptions, ou plutôt de ces deux regrets, que magnifient la volonté et le génie, va jaillir – c’est le terme qui convient le mieux s’agissant du Cinquième concerto – une œuvre profonde, violemment personnelle et enthousiaste malgré tout.
L’introduction du premier mouvement, Allegro, est confiée au soliste. Puis l’orchestre expose un premier thème et amorce le second, proposé par les violons en sautillé, et repris, legato, par les cors. Deux développements conduisent à la réexposition des deux éléments et contiennent l’essentiel de ce mouvement large et généreusement traité.
L’Adagio est écrit, par on ne sait quelle hardiesse ou originalité, dans la tonalité de si majeur, bien éloigné de la tonalité principale mais qui convient parfaitement à cette méditation religieuse et amoureuse, dont le thème a été exposé par le quatuor en sourdine.
Le Final, Allegro ma non troppo, est un rondo vigoureusement rythmé, pour certains, course vertigineuse et amoureuse, dont le thème a été exposé par le quatuor en sourdine.
Contemporain d’un grand nombre de mélodies, du Quatuor opus 74 et de la musique de scène d’Egmont, le dernier Concerto que Beethoven donna au piano mérite bien – une fois n’est pas coutume ! – ses surnoms de « Concerto héroïque », « l’Empereur », « l’Orgueil du piano ». Mais dans sa surabondance de pensée qui n’exclut nullement la clarté de son écriture, le Cinquième Concerto est bien digne surtout du jugement de Bettina Brentano qui affirmait en songeant à Beethoven : « Aucun empereur, aucun roi n’a jamais eu une telle conscience de sa force ».
Yves Hucher
Nomenclature orchestrale :
2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors, 2 trompettes, timbales et cordes.