Composé en 1806 et créé le 23 décembre de la même année par Franz Clement à Vienne
1. Allegro ma non troppo
2. Larghetto
3. Rondo
« Concerto par Clemenza pour Clement, primo Violino e direttore al teatro a Vienna » : curieuse dédicace que celle écrite par Beethoven sur la partition de son concerto, adressée à un jeune violoniste qui avait assuré un peu plus tôt, en tant que chef d’orchestre, la création de sa Troisième symphonie. Dans un étrange mélange de langues, cette dédicace laisse en effet apparaître une plaisante allusion à l’univers mozartien, rappelant que Franz Clement a été considéré par certains comme « le plus grand enfant prodige après Mozart » avant d’être nommé Konzertmeister au Theater an der Wien. En 1806, Beethoven s’engage donc dans la composition d’un nouveau concerto. Non pour le piano dont il est un remarquable virtuose, mais pour un instrument qu’il connaît bien puisqu’il a lui-même servi comme violoniste et altiste à la Cour de Bonn.
Entre 1790 et 1792 déjà, Beethoven s’était lancé dans l’écriture d’un ouvrage comparable, avant d’en abandonner l’idée et d’en réutiliser le matériau dans sa première symphonie. Ami des meilleurs interprètes de son époque, de Rodolphe Kreutzer, de Pierre Rode et d’Ignaz Schuppanzigh notamment, Beethoven a alors offert au violon quelques uns de ses plus beaux thèmes de sonates, de trios et de quatuors. Le 23 décembre 1806, il est donc revenu à Franz Clément de faire preuve de ses exceptionnelles qualités à l’occasion de la première du concerto. Déchiffrant en partie la partition qui vient d’être terminée, il a aussi dû choisir entre les différentes versions que lui avait proposées Beethoven quand, encore hésitant, ce dernier n’étaient pas parvenu à se décider. Enfin, il lui a fallu improviser les cadences qui n’ont être ajoutées à temps, tant d’effort ne l’ayant pas empêché de s’amuser entre deux mouvements en ajoutant un petit divertissement de son cru, joué sur son violon tenu à l’envers ! La fantaisie de Clement a-t-elle déplu à Beethoven ? Editée deux ans plus tard, la partition a été retravaillée, et la dédicace modifiée pour être désormais attribuée à Stephan von Breuning, un ami d’enfance du compositeur.
Ayant déconcerté son premier public, le Concerto pour violon de Beethoven n’a véritablement connu le succès que lorsqu’un autre interprète, Joseph Joachim, l’a repris sous la direction de Mendelssohn, à Londres en mai 1844. Dès les premières mesures, l’œuvre avait de quoi surprendre, alternant bois et timbales dans un délicat épisode piano e dolce. Beaucoup disent alors que Beethoven a évité la dimension virtuose et démonstrative propre au genre ; l’entrée du soliste, quasi seul sur de grands traits purement violonistiques, montre que le soliste demeure au-devant de la scène. Trilles, doubles cordes, passages en doubles croches, rien ne lui fera défaut tout du long des trois mouvements. La façon dont il s’approprie son premier thème ne l’oppose toutefois pas à l’orchestre ; hautbois et clarinettes conservent la mélodie principale tandis qu’il enrichit celle-ci de ses propres ornements. De même au début du Larghetto, où le chant se dédouble entre les bois et le violon. Produisant des effets de couleur et de relief, le soliste ne néglige donc pas les notes répétées des percussions du premier mouvement, et inscrit chaque numéro technique dans le développement thématique. Ainsi, avant même de rétablir les dialogues habituels, il s’assure la victoire, refusant la confrontation pour s’imposer de la manière la plus naturelle, et triompher à l’issue du premier mouvement comme à l’issue du finale, d’un grand élan ascendant.
François-Gildas TUAL
Nomenclature orchestrale :
flûte – 2 hautbois – 2 clarinettes – 2 bassons – 2 cors – 2 trompettes – timbales – cordes
Durée approximative : 42 minutes
Dernière exécution à Monte-Carlo : 4 octobre 2008 – Auditorium Rainier III – violon, Janine JENSEN