Composition : 2014
Orchestration : Élodie Bouny
Commande : Orquestra do estado de Mato Grosso
Dédicaces : à Luiz Carlos Borges (Fiesta), Juan Falú (Coração de camalote) et Algacir Costa (Contrabando)
Création : le 15 mars 2014 à Cuiabá par le compositeur et la Orquestra do Estado de Mato Grosso sous la direction de Leandro Carvalho.
- Fiesta (Fête)
- Coração de camalote (Cœur de Camalote)
- Contrabando (Contrebande)
Originaire de Passo Fundo, Yamandú Costa commence l’étude de la guitare auprès de son père, Algacir Costa, qui dirige l’ensemble Les Frontaliers, puis il se perfectionne aux côtés de Lucio Yanel, musicien argentin installé au Brésil depuis 1981, comptant probablement parmi les principaux représentants de la guitare gaucho. Se situant au Nord de l’état du Rio grande do Sul, dans le Sud du Brésil, Passo Fundo est à proximité de l’Argentine et du Paraguay, et plus bas de l’Uruguay. Sans doute est-ce pour cela que les frontières chantées par son père sont, pour lui aussi, devenues une source d’inspiration. Si une frontière délimite un territoire, elle est à la fois séparation et zone de passage, entre-deux dont on devine les doubles richesses. Le Concerto Fronteira témoigne de cette nécessité d’échanger. Quand, dans sa jeunesse, Yamandú Costa a emménagé avec sa famille dans l’état amazonien du Mato Grosso, il y a découvert une autre culture, peut-être plus proche de ses propres origines guarâniennes. Ne porte-t-il pas lui-même le nom du poète uruguayen Yamandú Rodriguez ? Le peuple Guaraní s’est finalement étendu sur une bonne partie de la zone amazonienne de l’Amérique du Sud, tout particulièrement au Paraguay et en Argentine. Désirant élargir son propre territoire en ouvrant ses frontières personnelles, Yamandú Costa a découvert la musique de Radamès Gnatalli à l’âge de quinze ans, et a compris que tout le Brésil n’était pas contenu dans sa région natale. Baden Powell, Tom Jobin et Raphael Rabello lui ont alors indiqué comment rassembler dans son art les trésors de l’Amérique du Sud : choros, bossa nova, milonga, tango, zamba et autres chamamés.
Au croisement des styles savants et populaires, Yamandú Costa suit a suivi les exemples du guitariste et compositeur Radamés Guinattali, du maître du style « bossa nova » Tom Jobim, ainsi que de Piazzolla, qui a réinventé le tango argentin. Destiné à l’Orchestre de l’État du Mato Grosso et à son chef Leandro Carvalho, le Concerto de Fronteira retrouve un peu, dans son premier mouvement festif, l’esprit des ensembles à cordes pincées d’Herminio Gimenez ou de José Asunción Flores, sur la trace des orchestres typiques. Dédié à l’accordéoniste gaucho Luiz Carlos Borges, c’est un chamamé, caractéristique du Nord de l’Argentine mais originaire du Brésil. Les cordes semblent imiter les étirements et les légers tremblements de l’accordéon, tandis que le mouvement tout entier devient un hymne à la rencontre des cultures, le chamamé s’étant lentement formé au contact des Indiens Guarani, des conquérants espagnols, puis des migrants italiens et allemands. Dédié à Juan Falu, le deuxième mouvement s’inspire des « musiques de rivière » et emprunte son titre à des jacinthes typiques des eaux tropicales ; son caractère lent et nostalgique se rapproche du style portugais de la Guarânia (au sens musical du terme), défendue dans les années vingt par le Paraguayen José Asunción Flores. Un bel hommage à son dédicataire, guitariste argentin, qui n’a cessé de bâtir des ponts musicaux entre le Brésil et son pays natal, quitté pour des raisons politiques. Dédié au père de Yamandú Costa, le troisième mouvement raconte enfin la traversée des contrebandiers entre l’Argentine et le Brésil, leur interception par la police, un échange de tirs et leur fuite. Une véritable petite scène vivante, animée par les musiciens qui chuchotent, frappent dans les mains, sur leurs instruments ou, du pied, sur le plancher…
François-Gildas TUAL
Durée : 23 minutes environ
Nomenclature orchestrale : flûte, hautbois, clarinette, basson, 2 cors, trompette, guitare, cordes
Première exécution à Monte-Carlo